Le corps humain compte plus de 200 types de cellules différentes. Chaque cellule est spécialisée dans l’exécution d’une fonction spécifique ou dans la formation d’un tissu spécialisé. Lorsque les cellules ne fonctionnent pas correctement, différentes maladies peuvent survenir. Les scientifiques ont maintenant mené des recherches qui ouvrent un tout nouveau monde à l’intérieur de nos cellules.
À chaque minute de la journée, notre corps s’adapte pour répondre aux besoins du moment. Lorsque nous mangeons des glucides, faisons de l’exercice ou tombons malades, les réactions chimiques dans nos cellules se déclenchent, ralentissent ou changent de stratégie pour nous donner l’énergie et la force dont nous avons besoin. Tout cela se produit sans que nous le sachions, ce qui explique peut-être pourquoi nous savons si peu de choses sur la façon dont l’organisme perçoit ces demandes constantes et y répond. Pour tenter de répondre à cette question, des scientifiques de l’University of Utah Health ont mené de nouvelles recherches. Leur étude, publiée dans Science, met en évidence un vaste réseau d’interactions qui suggère comment les cellules s’adaptent en temps réel pour résister aux contraintes qui pèsent sur notre santé.
Une meilleure compréhension du fonctionnement de nos cellules
Ces découvertes – et la technologie qui les a rendues possibles – sont devenues le fondement de la société de biotechnologie Atavistik Bio, cofondée par Jared Rutter, Ph.D., professeur distingué au département de biochimie de l’université de l’Utah. L’entreprise utilise ces nouvelles connaissances pour accélérer la découverte de médicaments contre les maladies métaboliques et le cancer. À un niveau plus fondamental, les progrès réalisés nous permettent d’approfondir notre connaissance du fonctionnement des cellules et de notre organisme.
Le réseau décrit dans l’étude représente un niveau sous-estimé de régulation des cellules qui provient d’une source inattendue. Depuis près de 20 ans, le laboratoire de M. Rutter étudie le métabolisme, c’est-à-dire les réactions chimiques qui génèrent de l’énergie et forment les composants essentiels au bon fonctionnement des cellules. Leurs nouvelles recherches montrent que les intermédiaires de ces réactions chimiques ne sont pas seulement des blocs de construction passifs et des sources de carburant pour les cellules, comme on l’a longtemps supposé.
Au contraire, ces intermédiaires, ainsi que d’autres métabolites, forment un vaste réseau de sentinelles qui surveillent l’environnement et incitent les cellules à s’adapter si nécessaire. Pour ce faire, ils interagissent avec les protéines et modifient leur fonctionnement. Un repas copieux apporte-t-il trop de glucides à votre organisme ? Ou trop de graisses ? À l’instar d’un aiguillage qui oriente un train sur une nouvelle voie, ces interactions protéine-métabolite modifient les processus métaboliques afin de décomposer ces nutriments et de stabiliser le cours des choses.
Développement de nouvelles approches thérapeutiques
Le premier auteur de l’étude, Kevin Hicks, a mis au point une nouvelle technologie appelée MIDAS qui révèle la taille du réseau de régulation agissant à l’interface entre les stimuli environnementaux et le métabolisme cellulaire, appelé interactome protéine-métabolite. Cette technique très sensible a permis d’identifier des interactions qui n’avaient jamais été observées auparavant. Une analyse de 33 protéines humaines impliquées dans la conversion des hydrates de carbone en carburant a révélé 830 interactions avec des métabolites. Étant donné qu’il y a des milliers de protéines dans la cellule, la taille globale du réseau devrait être beaucoup plus importante. Les processus métaboliques qui échappent à tout contrôle peuvent entraîner des maladies et de nombreuses affections. Les chercheurs pensent que la mise en lumière d’interactions supplémentaires dans le réseau permettra de mieux comprendre les causes profondes des maladies et de développer de nouvelles approches thérapeutiques pour remettre les choses sur les rails.
Les cellules du cancer du sein dans les poumons peuvent déclencher des tumeurs secondaires
L’importance du bon fonctionnement de nos cellules est démontrée lorsque des maladies telles que le cancer se développent. Des recherches récentes ont permis de découvrir pourquoi les cellules cancéreuses du sein qui se sont propagées aux poumons peuvent se « réveiller » après des années de sommeil et former des tumeurs secondaires incurables. Les travaux de la chercheuse mettent en évidence le mécanisme qui déclenche cette « bombe à retardement » du cancer du sein et suggèrent une stratégie pour la désamorcer.
Les patientes atteintes d’un cancer du sein à récepteurs d’œstrogènes positifs (ER+) – le type le plus courant – courent le risque permanent de voir leur cancer réapparaître dans une autre partie de leur corps plusieurs années, voire plusieurs décennies, après avoir été diagnostiqué et traité à l’origine. Lorsque les cellules cancéreuses se propagent du premier cancer du sein à d’autres parties du corps, on parle de cancer du sein secondaire ou métastatique, qui peut être traité mais non guéri. La nouvelle étude, publiée dans la revue Nature Cancer, montre comment les changements moléculaires qui se produisent dans les poumons au cours du vieillissement peuvent favoriser la croissance de ces tumeurs secondaires.
Des bloqueurs de croissance du cancer appelés Imatinib
L’équipe de l’Institute of Cancer Research de Londres a découvert que la protéine PDGF-C présente dans les poumons joue un rôle clé dans le sommeil ou le « réveil » des cellules cancéreuses du sein inactives. Ils ont découvert qu’une augmentation des niveaux de PDGF-C, qui est plus probable avec le vieillissement des poumons ou lorsque leur tissu est endommagé ou cicatrisé, peut entraîner la croissance des cellules cancéreuses dormantes et le développement d’un cancer du sein secondaire. Les chercheurs ont ensuite cherché à savoir si le blocage de l’activité du PDGF-C pouvait contribuer à empêcher ces cellules de se « réveiller » et à prévenir la croissance de tumeurs secondaires.
Les chercheurs du Breast Cancer Now Toby Robins Research Center de l’Institut de recherche sur le cancer ont travaillé sur des souris atteintes de tumeurs ER+ et ont ciblé la signalisation PDGF-C à l’aide d’un inhibiteur de croissance cancéreuse appelé imatinib, qui est actuellement utilisé pour traiter les patients atteints de leucémie myéloïde chronique. Les souris ont été traitées avec le médicament avant et après le développement des tumeurs. La croissance du cancer dans les poumons a été significativement réduite dans les deux groupes.
Les chercheurs envisagent maintenant de mieux comprendre comment les patients pourraient bénéficier du médicament existant, l’imatinib, et, à long terme, de mettre au point des traitements plus spécifiques ciblant le mécanisme de « réveil ».